Douze concerts :
découvertes et émotions
Les cieux ne furent pas cléments pour accueillir le premier concert « Jeunes Talents » de la semaine de Festival. Mais il en fallait plus pour décourager le public nombreux qui s’était déplacé au musée de Bibracte pour écouter l’accordéoniste virtuose, Thibault Trosset. Un peu serré sous l’amphithéâtre couvert, le public a vite crée autour du jeune artiste un chaleureux écrin d’écoute. Après des transcriptions de pièces de Mozart pour orgues mécaniques, le concert se poursuivait avec György Ligeti. Une double occasion de découvrir la musique allègre de ce compositeur et l’extraordinaire capacité de l’accordéon à servir ces partitions. Après trois rappels enthousiastes, le beau temps était revenu sur Bibracte.
Le mardi soir, avec la programmation de Vassilena Serafimova, nous avons proposé une « première » à l’église de Millay : un concert de percussions.
De création originales en Rebonds avec Xénakis puis chaconne de Bach, Vassilena nous a fait vibrer au rythme du bel échantillon de « percus » installées dans la nef. Les pièces jouées au marimba ont conquis le public peu habitué à voir autant qu’à entendre cet instrument spectaculaire. La performance musicale et chorégraphique de cette artiste, son intense engagement ont enflammé l’église et démontré que ce répertoire est accessible à tous lorsque qu’il est interprété avec passion.
Comme chaque année, nous avons retrouvé Saint-Honoré-les-Bains pour le concert du mercredi après-midi de l’ensemble Sarbacanes. Quatre « Jeunes Talents » sur instruments anciens ont transformé, pour le plaisir de tous, la salle Sydney Bechet en salon de musique du Roi Louis XIV. Entrelaçant les différentes pièces transcrites, de présentations du contexte de composition des œuvres, les musiciens nous ont appris sur la musique de l’époque et éclairé sur la vie de François Couperin .
La soirée du mercredi était consacré à J.S Bach servi par le violoncelle baroque de Markku Luolajan-Mikkola. En accord avec le thème de notre seizième édition, Markku nous a proposé dans une première partie des transcriptions de pièces pour violon. Ce fut une expérience un peu dépaysante pour nos oreilles de découvrir ces œuvres jouées au violoncelle. Poursuivant par des suites écrites pour l’instrument, ce musicien exigeant a conquis les nombreux passionnés de la musique du Cantor de Leipzig, venus pour l’occasion.
Avec la « singulière journée », nous avons fait le pari d’intéresser le public à trois concerts successifs autour du piano.
En début d’après midi, Mathilde Marsal (violon) et Malo Courbaron (piano) « jeunes talents » prometteurs nous ont donné à voir le plaisir de la musique de chambre, comme à entendre le plaisir à jouer ensemble. Avec un riche programme coloré, le duo a ouvert l’appétit aux nombreuses oreilles déjà présentes.
L’intense complicité de Claire Désert et Emmanuel Strosser, à quatre mains, a illuminé le concert suivant. Le programme Schubert, entrelacé en écho de pièces de Kurtag a ravi le public, qui a fait un triomphe à ces interprètes d’exception. L’élégante chorégraphie des quatre mains sur le clavier ajoutait encore à la totale réussite de ce beau moment du Festival.
Mais l’appétit des amoureux du piano restait grand ouvert pour accueillir le récital de Geoffroy Couteau. Une grande programmation romantique nous a été offerte pour ce concert du soir, Liszt, Schumann et Brahms. En présence du compositeur Rodolphe Bruneau-Boulmier, ami fidèle du festival, Geoffroy nous a donné à entendre de nouvelles pièces de Rodolphe. Comme pour souligner l’harmonie de cette journée, nous avons assisté à un épisode de confraternité entre pianistes. Suite à un incident avec sa partition numérique, Geoffroy a pu compter sur Claire qui s’est spontanément improvisée, tourneuse de page.
Notre ambition avec les concerts « jeunes talents » est de donner à des artistes en début de carrière, l’occasion d’exprimer leurs talents dans les meilleures conditions. Vendredi après midi, ce fut une véritable révélation que d’entendre la pianiste Fiona Mato dans les pièces de Liszt, Busoni (transcription de la chaconne de JS Bach) et la création de la composition d’Alexandros Markéas, commande du Festival. Nous serons probablement heureux dans plusieurs années d’avoir accueilli cette artiste pleine de promesses.
« Outre Mémoire », expérience sensorielle autour de la mémoire de la traite négrière, nous a conduit vendredi soir sur le rivage réputé difficile de la musique contemporaine. Or, c’est bien un long choc émotionnel que cette musique a produit sur le public. La violence de la traite négrière, l’arrachement des ces hommes à un continent, toutes ces victimes laissées à la mer, l’aspiration à la liberté par la fuite dans la forêt ont repris forme musicale ce soir là à l’église de Millay. Barbarie transposée en œuvre artistique par Thierry Pécou, pour que l’on n’oublie pas.
C’est la salle des fêtes de Luzy qui recevait samedi l’Orchestre d’Harmonie de Luzy et son chef Yann Bail. Au premier regard on remarquait le rajeunissement et le renforcement de l’effectif, mis en valeur par le dispositif scénique. Le programme coloré Gershwin, Piazzola, Williams comprenait aussi des pièces plus classiques de Nielsen, Bruckner et Fauré où la formation a pu démontrer sa capacité à tout jouer avec bonheur.
Le concert du samedi soir était une évocation des nuits d’été, particulièrement les hispaniques. Au programme les Grands d’Espagne étaient convoqués (De Falla, Nin, Turina, Fernandez Arbos…).
Le Trio Karenine a rapidement entraîné l’assistance dans sa fougue juvénile, donnant des accents méditerranéens à cette soirée bourguignonne. En seconde partie avec le trio de Ravel, monument de la musique de chambre, les Karenine nous ont offert une splendide interprétation qui a fini d’enthousiasmer le public pour ce dernier concert à l’église de Millay.
Pour remercier l’équipe municipale et Jocelyne Guerin de leur engagement continu à nos côtés, nous avons souhaité cette année clôturer la semaine de festival à Luzy.
C’est à « guichet fermé » que le spectacle de cabaret-concert “Bye Bye Berlin”
a été présenté par le Quatuor Manfred accompagné de Marion Rampal au chant et Raphaël Imbert au saxophone. Évocation des années sombres de la montée du nazisme, hommage aux artistes compositeurs contraints à l’exil, éloge de la liberté en musique, c’est tout cela qui nous a été donné à entendre, servi par l’émouvante voix de Marion Rampal.
Heureux de ces derniers applaudissements nourris, l’équipe du Festival a donné rendez-vous au public pour la dix-septième édition en 2018.